À partir de janvier, un arrêt de l’accès au matériel stérile d’injection risque de conduire à une crise sociosanitaire en termes de transmission du VIH, des hépatites et de l’accompagnement social des publics à risque, en Région de Bruxelles-Capitale.
Bruxelles, 3 décembre 2024 • Le marché mondial des drogues continue à prendre de l’ampleur, un public toujours plus large et diversifié s’expose aux dommages qui entourent l’usage de drogues. Le partage de matériel usagé compte parmi les principaux facteurs de risques somatiques associés aux pratiques de consommation. L’accès au matériel stérile de consommation a par contre largement permis de limiter ces risques, surtout en ce qui concerne la propagation des maladies infectieuse telles que le virus de l’immunodéficience humaine (VIH) et l’hépatite C. L’ONUSIDA insiste notamment sur le fait qu’un accès inconditionnel au matériel d’injection pour une consommation à moindre risque, comme les aiguilles ou les seringues, est une stratégie essentielle pour atteindre l’objectif de mettre fin à l’épidémie de sida dans l’ensemble des territoires concernés d’ici à 2030.
À Bruxelles, la distribution de seringues est protégée depuis l’an 2000 par un cadre légal élargi au tissu associatif, mais l’absence de gouvernement et de prise de décision sur la reconduction de certaines lignes budgétaires entraînera l’arrêt de ces programmes de distribution à partir de janvier 2025. La fédération bruxelloise des institutions spécialisées en matière de drogues et d’addictions tire la sonnette d’alarme et exhorte les pouvoir publics régionaux à prendre de toute urgence la pleine mesure du potentiel désastre sanitaire annoncé.
Là où ils sont appliqués, les programmes d’accès au matériel stérile de consommation ont démontré leur efficacité, mais aussi leur rentabilité. En termes d’investissement public, ces programmes sont l’une des interventions de santé les plus rentables. En prévenant les contaminations, la collectivité épargne sur les coûts exorbitants des traitements (antirétroviraux pour le traitement du VIH et antiviraux pour l’hépatite C).
Les stratégies de Réduction des risques ont largement démontré leur efficacité, pas seulement en ce qui concerne les risques associés à la consommation de drogue. Elles ont aussi été largement mobilisées pour contrer l’épidémie récente de COVID 19 (gestes barrières, diffusion de masques, campagne de vaccination, etc). Ce ne sont certes pas les mêmes outils qui ont été mobilisés pour contrer la propagation de la grippe AH1N1, mais la philosophie d’action est sensiblement la même, mettre en œuvre tous les moyens efficaces pour contrer la propagation du virus. Les maladies n’ont pas de frontière, elles ne sont pas confinées aux milieux à risque, nous sommes tous concernés, la santé n’a pas de prix.
L’accès au matériel stérile constitue également une formidable opportunité d’entrer en contact avec les personnes à risque, vulnérables et marginalisées. Les services et associations de première ligne s’appuient sur ce matériel pour accueillir, accompagner et orienter les personnes vers des trajectoires de soins, des programmes de traitement et d’inclusion. Ils ont cette capacité d’adaptation aux circonstances, à répondre à l’urgence de certaines situations de crise et collent aux besoins en temps réel. Ils sont aussi des acteurs essentiels pour lutter contre la stigmatisation et la marginalisation des personnes usagères de drogues. Leur travail s’inscrit dans une approche de santé publique holistique telle que plébiscitée par les agences onusiennes. Récemment encore, le 30 avril dernier, la rapporteuse spéciale de l’ONU sur le droit à la santé, Tlaleng Mofokeng, a appelé les États à déployer l’ensemble des outils de réduction des risques liés à l’usage de drogues, des traitements de substitution aux opioïdes jusqu’aux programmes d’échanges de seringues, en passant par les salles de consommation à moindre risque et l’analyse de produits.
La Région bruxelloise compte 21 points d’accès de distribution de matériel stérile de consommation gérés par 13 services. Cela représente plus de 22 000 contacts, concerne plus de 2 000 personnes par an, et un budget d’achat de matériel d’environ 150 000 €/an, non garanti à ce jour pour 2025. Le cas échéant, notre secteur ne serait pas non plus en mesure de continuer à fournir les kits de matériel (stérifix) pour les pharmacies, alors qu’en Belgique, nous faisons face à une hausse ininterrompue des cas de VIH depuis trois ans (+13 % de diagnostic VIH en 2023 par rapport à 2022), le secteur bruxellois spécialisé dans la prise en charge des personnes usagères de drogues ne peut que déplorer le manque de clarté et de financement pérenne qui menace aujourd’hui les acquis de 30 ans de politiques de prévention et de réduction des risques en matière d’assuétudes. L’absence de décision en la matière pourrait coûter très cher à l’ensemble de la société. Nous attendons des autorités un cadre de financement pérenne et une solution rapide pour assurer la continuité de ces programmes afin de prévenir des contaminations et réduire les risques d’épidémie.
Pour la féda bxl,
Catherine Van Huyck, présidente
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