Quand les femmes trinquent (Alter Échos)

La revue Alter Échos de février 2025 consacre un dossier à l’alcool. On y retrouve également cet article abordant la question de l’alcool chez les femmes, intitulé « Quand les femmes trinquent », signé par Manon Legrand.

L’alcoolodépendance féminine a longtemps été un problème impensé. Elle demeure aujourd’hui entourée par des jugements sociaux et moraux. Mais peu à peu, les murs du silence se fissurent et révèlent les enjeux spécifiques de la consommation et de la dépendance à l’alcool chez les femmes.

(…) Des femmes qui boivent, on en connaît, voire on en est. On en voit, souvent, et partout. Dans la rue, dans les bars, au repas du personnel, au marché de Noël, au cinéma, à la table de famille…

Mais comment la société regarde-t-elle et se préoccupe-t-elle de celles qui boivent beaucoup, celles qui boivent trop, celles qui ne peuvent plus s’en passer? (…)

Les repères de consommation à risque sont fixés par le Conseil supérieur de la santé à 10 verres standards au maximum par semaine, deux par jour et au moins deux jours sans alcool par semaine. Le CSS recommande aussi aux jeunes de moins de 18 ans ainsi qu’aux «femmes enceintes, celles qui souhaitent le devenir et les femmes qui allaitent, de ne pas boire de boissons alcoolisées». (…)

Chez Infor Drogues & Addictions, on ne définit pas la dépendance par la quantité ou la fréquence. «Une personne est dépendante à l’alcool lorsqu’elle ne sait pas remplir des besoins autrement qu’avec sa bouteille», explique Antoine Boucher, porte-parole de l’association bruxelloise. Et de poursuivre: «Les drogues répondent à des fonctions: créer du lien social, se donner une identité (sociale, professionnelle…) et gérer ses émotions. L’alcool, à la différence d’autres produits, comme la morphine par exemple, répond à ces trois fonctions, d’où sa présence massive et son succès», encouragés aussi par le fait qu’il est totalement légal. (…)

Outre son rôle de lubrifiant social, l’alcool est aussi utilisé comme anesthésiant des souffrances. Et là aussi, les femmes trinquent. «Des études menées sur des femmes (ex-)consommatrices révèlent que des traumas vécus pendant l’enfance et l’adolescence sont fréquemment à l’origine de ruptures familiales accompagnées d’une entrée dans la consommation», rapporte la Fédération bruxelloise Drogues et Addictions (FEDA), dans une analyse de 2023 sur le rapport du genre aux assuétudes. Les violences psychologiques, physiques ou sexuelles peuvent amener la victime à adopter des conduites dites «dissociantes» pour ne pas faire face au souvenir de l’agression. (…)

«L’alcool joue un rôle de dépresseur et d’anxiolytique. Les femmes l’utilisent comme automédication contre leurs souffrances psychosomatiques», constate aussi Charlotte Bonbled de DUNE, dispositif de réduction des risques liés à l’usage de drogues en milieu précaire, qui depuis 2018, consacre chaque lundi un espace spécifiquement dévolu aux femmes afin de leur apporter l’attention et la prise en charge spécifiques requises

Lire l’article : Quand les femmes trinquent (Alter Échos n° 521, 03/02/2025 )


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